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Abominable ! Le passage à l'an 2000 sera une
catastrophe sans précédent et le nombre de faillites provoquées par la non-intégration
de la part des systèmes informatiques de cette date fatidique sera énorme. Abominable,
ce sera abominable, nous dit-on. D'ailleurs, la dernière étude britannique sur ce sujet
n'est vraiment pas gaie. Le passage à l'an 1000 devait également se solder par la fin du
monde, cette fois provoquée par des cataclysmes naturels ou la colère de Dieu.
Repentez-vous et vous serez sauvés, proposaient certains en ce temps-là. Dans un monde
désormais informatisé, il paraît logique d'imaginer que la colère de < Big Brother
> sera à l'origine de la prochaine fin du monde.
Tout cela tombe d'autant mieux qu'un certain nombre de personnes se proposent de faire en
sorte que quelques entreprises passent au travers. Cela coûtera très cher (un marché
planétaire de 600 milliards de dollars), mais ils peuvent le faire. Il est toutefois
amusant de noter que les < spécialistes > et autres < experts en passage à l'an
2000 > ne se font connaître comme tels que depuis quelques mois. Si l'on reprend la
presse généraliste d'il y a deux ans à peine, on retrouve difficilement un article
mentionnant cette future catastrophe. De même, sur le World Wide Web, la prolifération
de sites consacrés à ce sujet ne date pas de plus de quelques mois. Peut-on en conclure
que la médiatisation du passage à l'an 2000 prépare la fortune de ces spécialistes,
experts et autres conseils ? Sans doute. Doit-on pour autant minimiser le problème ? Sans
doute pas...
En Grande-Bretagne, la Task Force 2000, soutenue par le gouvernement, vient de s'exprimer
sur le sujet à la mode. Il ressort de ses travaux que les risques de < bogue > (*)
s'appliquent également à certains appareils contenant des microprocesseurs. Le problème
concernerait donc, outre les ordinateurs, les feux de signalisation routière, certains
appareils ménagers, ou encore les puits de pétrole, les téléphones (et leurs
centraux), etc.
Alors que faire ? D'autant que les travaux du groupe révèlent que seule une entreprise
sur dix en Grande-Bretagne a réalisé un audit interne sur ce sujet. Pis, seuls 28 % des
dirigeants d'entreprise sont sensibilisés à ce problème. C'est toutefois mieux que les
15 % enregistrés il y a un an. Les experts de la Task Force 2000 et le ministère du
Commerce et de l'Industrie se sont cependant refusés à soutenir une récente proposition
de loi rendant obligatoire la mise à niveau pour les entreprises. Ils sont plutôt
favorables à une campagne de sensibilisation. Derrière laquelle s'engouffreront sans
doute la plupart des cabinets de conseil.
Raison garder
Le problème est sérieux. Il est clair qu'une
bonne partie des systèmes informatiques des entreprises souffriront du passage à l'an
2000. Par ailleurs, si l'on s'inquiète de la survie des entreprises privées, il
conviendrait de regarder ce qui se fait (ou ne se fait pas) dans le secteur public...
Cependant, il convient de raison garder. Le passage à l'an 2000 peut, dans la plupart des
cas, être réglé par une solution logicielle, procédure peu lourde. Par ailleurs, tous
les ordinateurs et toutes les applications ne sont pas concernés par ce problème. Loin
de là. Les éditeurs de logiciels sont sensibilisés au passage à l'an 2000 et il n'est
pas improbable qu'ils diffusent rapidement des mises à jour afin d'éviter un effet <
image > très négatif sur leurs produits. Cela devrait aussi bien concerner les
fabricants d'applications destinées à la micro-informatique que les entreprises qui
vendent de très grosses architectures informatiques pour des clients institutionnels.
L'enjeu est sensiblement le même.
Rares sont les experts qui gardent la tête froide. Raison de plus pour citer Massimo
Spalla, directeur Europe des projets an 2000 chez Andersen Consulting : < Ce ne sera
pas aussi catastrophique que ce que l'on annonce aux entreprises (...). Les sociétés qui
n'auront pas réglé le problème ne feront pas forcément faillite au tournant du
siècle. Elle seront certes moins efficaces et donc moins rentables. >
En conclusion, s'il ne faut pas minimiser le problème du passage à l'an 2000, il ne faut
pas non plus se laisser déstabiliser par des cris d'orfraie. Il convient en tout état de
cause de sensibiliser la hiérarchie des entreprises. D'autant que les directions
informatiques ont souvent peur de demander un budget pour le passage à l'an 2000 alors
qu'elles obtiennent difficilement les montants nécessaires au passage à l'euro.
Kitetoa
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